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Masson, Laurie-Anne, « L’anomalie et le « tout-autre » : réflexion sur l’horreur cosmique, l’imaginaire de la souillure et la rationalisation du mal dans la série « Stranger Things » », Premières lignes, hors série, 2025, en ligne.

L’anomalie et le « tout-autre » : réflexion sur l’horreur cosmique, l’imaginaire de la souillure et la rationalisation du mal dans la série « Stranger Things » – Laurie-Anne Masson

Disponible uniquement en streaming sur la plateforme Netflix, la série télévisuelle Stranger Things1 s’est ancrée solidement dans la culture populaire contemporaine dès la sortie de sa première saison en 2016. Comptant déjà quatre saisons, la série s’entame alors qu’Eleven, une jeune cobaye possédant des pouvoirs psioniques, réussit à s’enfuir du laboratoire où elle a été élevée et à se réfugier dans la petite ville avoisinante, Hawkins. Elle se lie d’amitié avec Mike, Lucas et Dustin, trois garçons à la recherche de leur ami Will, mystérieusement disparu un soir après une de leurs séances de Donjons et dragons. Ils apprennent finalement que Will a été capturé par un monstre anthropophage et ramené dans son antre, l’Upside Down. Cet univers parallèle habité par des monstres s’est mêlé au leur par une brèche formée dans le laboratoire de Hawkins.Du cinéma hollywoodien, la série Stranger Things retient le budget, le rendu technico-visuel et ses effets spectaculaires. De la série télévisuelle, elle retient la longueur du format, ce qui lui permet d’élaborer des sous-intrigues et des arcs narratifs variés. Chaque saison, la production culturelle s’attarde au conflit entre de nouveaux antagonistes et les protagonistes. La variation de l’antagonisme principal d’une saison à l’autre nous permet de déceler une évolution dans la conception de l’« ennemi » et du mal auquel il est associé au courant de la série. En effet, les antagonistes surnaturels et transdimensionnels – notamment les monstres anthropophage (Demogorgon) ou eldritch (Mind-Flayer) des saisons 1 et 2 – laissent place à des ennemis distinctement humains lors des saisons 3 et 4, lesquels sont responsables de la présence de forces surnaturelles (Vecna, Laboratoire de Hawkins) ou les instrumentalisent à des fins nationales ou politiques (Union soviétique, CIA). En s’attardant à la conception du mal élaborée par Gottfried Wilhelm Leibniz2, l’on perçoit au cours de la série le déplacement d’un mal davantage métaphysique – c’est-à-dire qui a trait à l’imperfection du monde, à l’irruption d’une anomalie dans l’ordre – vers un mal proprement moral – c’est-à-dire qui a trait au péché, au mal infligé par l’humain. Tranquillement, le mal perçu comme surhumain, foncièrement « autre », perd son caractère extraordinaire lorsque ses origines sont révélées.

Ce travail vise donc à comprendre comment le déplacement de la nature de l’antagonisme s’opère au cours de la série en s’attardant à la représentation de l’irrationalité du mal à travers la figure de l’anomalie. Celle-ci trouve sa définition chez Mary Douglas dans son ouvrage De la souillure, comme « élément qui ne s’insère pas dans une série ou ensemble donnés3 ».

Pour ce faire, le travail qui suit s’attardera à la place accordée à la figure de l’anomalie dans le genre de l’horreur cosmique, dont la série emprunte plusieurs codes, ainsi qu’à celle qu’elle occupe dans l’imaginaire de la souillure qui s’articule à même l’univers diégétique de l’œuvre. Le travail soulignera divers rites de purification et d’intégration réalisés par les personnages dans le but de contrer la menace posée par l’anomalie. Cela permettra ensuite d’expliquer la rationalisation du mal qui s’opère au fil de la série, c’est-à-dire sa transition d’un état irrationnel, sous-conscient et propre aux affects, à un état rationnel pouvant être appréhendé par des concepts.

Le « tout-autre » : Horreur cosmique, numineux et monstruosité incommensurable

Tout d’abord, l’on utilise les dénominatifs « horreur cosmique », « horreur lovecraftienne » ou « horreur eldritch » pour qualifier l’œuvre de H.P. Lovecraft où se déploie un motif récurrent : l’émergence d’une figure extraterrestre ou extradimensionnelle provoquant une terreur profonde chez le personnage témoin. Dans son essai, Supernatural Horror in Literature, Lovecraft s’attarde aux caractéristiques esthétiques et formelles à la base du genre de l’horreur surnaturelle et plus spécifiquement de la weird literature :

A certain atmosphere of breathless and unexplainable dread of outer, unknown forces must be present; and there must be a hint […] of that most terrible conception of the human brain – a malign and particular suspension or defeat of those fixed laws of Nature which are our only safeguard against the assaults of chaos and the daemons of unplumbed space4.

Dès lors, l’horreur lovecraftienne se définit non seulement par le climat de peur existentielle et irrationnelle (« unexplainable dread ») qui s’en dégage, mais aussi par l’effritement de la rationalité humaine (« suspension or defeat of those fixed laws of Nature ») face à des forces inconnues qui la transcendent. Le déni de l’être humain quant à sa propre impuissance est au cœur du projet lovecraftien ; les modèles scientifiques et rationnels qui nous servent de protection contre le chaos ne sont en fait qu’une illusion de sécurité qui peut se désagréger lorsque confrontée à une entité cosmique qui vient dépasser, ou s’inscrire comme anomalie, par rapport à une conception rationnelle de la réalité. À ce titre, « [t]he most merciful thing in the world, I think, is the inability of the human mind to correlate all its contents5 », car la confrontation de l’individu au bris de sa perception de la réalité, la rupture des mécanismes de son inconscient, ne le laisse pas indifférent : un tel phénomène suscite chez lui un « unexplainable dread », un effroi incommensurable.

Le Mind-Flayer, un antagoniste principal de la saison 2 de Stranger Things, est une créature immense qui semblerait incorporelle si ce n’était de la fumée qui délimite vaguement son être. Pourtant, contrairement aux personnages humains, son influence ne se limite pas à son corps. En effet, le Mind-Flayer peut déployer sa conscience à travers d’autres êtres vivants :

MIKE : Ok, so, the shadow monster’s inside everything. […] The hive mind.
STEVE : The hive mind?
DUSTIN: A collective consciousness. It’s a super-organism.
MIKE : And this is the thing that controls everything. (S2, EP8, 26:16-26:35)

En tant que « super-organism », le Mind-Flayer transcende les limites naturelles auxquelles les humains sont soumis. Non seulement l’entité antagoniste est capable de choses inconcevables pour les êtres humains, mais l’accent mis sur son omniprésence (« inside everything ») et son omnipuissance (« controls everything ») témoigne de la menace qu’elle pose et de l’impossibilité des personnages protagonistes à la contrôler en retour. 

DUSTIN : I thought we were waiting for military backup.
MIKE : Even if they come, how are they gonna fight this? You can’t just shoot it with guns!
HOPPER : You don’t know that! We don’t know anything! (S2, EP8, 28:10-28:20)

De manière similaire au motif de l’horreur cosmique, les méthodes usuelles mises en place pour protéger les personnages, qu’elles soient mentales ou physiques (dans ce cas-ci, « the military backup »), sont inopérantes face à l’entité cosmique de laquelle « [w]e don’t know anything ». Comment se défendre contre une menace qui peut exister dans « everything », qui n’a pas de corps à proprement parler, mais seulement une vague impression faite de fumée ? Lors de sa communication Numinous Dimensions : Exploring Otto’s Concept of the Numinous in Stoker, Machen and Lovecraft6, Hunter soulève comment l’horreur cosmique théorisée par Lovecraft s’apparente particulièrement à la notion de mysterium tremendum chez Rudolf Otto. Cette dernière est l’une des deux facettes paradoxales du numineux qui se rapporte à l’expérience irrationnelle du religieux. Caractérisé par son étrangeté radicale, son caractère « tout-autre » qui « se dérobe à notre entendement dans la mesure où il est “transcendant par rapport à nos catégories”7 », l’objet numineux est foncièrement irrationnel. Ce n’est que par le sentiment qu’il suscite chez l’humain que celui-ci peut l’envisager, puisqu’« [e]n tant que “radicalement différent” de toute donnée ordinaire, il est inexprimable8 ». Dans le cas du mythos lovecraftien, le caractère inconcevable des entités cosmiques se perçoit notamment par leur onomastique inhabituelle – Cthulhu, Azathoth, Yog-Sothoth, Shub-Niggurath, Nyarlathotep, etc. – qui implique une prononciation impossible par l’être human : « the word [Cthulhu] is supposed to represent a fumbling human attempt to catch the phonetics of an absolutely non-human word. The name of the hellish entity was invented by beings whose vocal organs were not like man’s, hence it has no relation to the human speech equipment9 ».

Otto souligne aussi comment « l’objet [numineux] reste dans l’obscurité de l’expérience purement sentimentale, impossible à traduire en concept10 ». Le sentiment suscité lors de l’expérience de l’étrangeté radicale peut se scinder en deux axes : le mysterium fascinans, un sentiment d’attraction irrésistible et inévitable face au phénomène numineux, et le mysterium tremendum, un sentiment d’effroi mystique, de terreur profonde. La terreur survient lors de la prise de conscience de la différence radicale entre la puissance numineuse et nous, et, du même fait, de notre vulnérabilité intrinsèque, de notre incomplétude en tant qu’être : « Par contraste avec la puissance que nous pressentons en dehors de nous, [le sentiment d’état de créature] se précise en tant que sentiment de notre propre effacement, de notre anéantissement, conscience de n’être que poudre et que cendre, de n’être que néant11 ». C’est ce même sentiment d’impuissance que Will tâchera d’exprimer en racontant sa rencontre avec le Mind-Flayer :  

JOYCE: What is it? 
WILL :  I don’t know, It’s almost more like a feeling.
JOYCE : What does it want?
WILL : I don’t know. It came for me and… And I tried. I tried to make it go away […] But it got me Mom. I feel it everywhere. Everywhere. I–I still feel it. (S2, EP4, 3:54-4:50)

L’on peut non seulement déceler dans l’extrait ci-haut une incapacité à décrire l’entité cosmique (« I don’t know »), mais aussi une tentative de définition qui s’ancre dans l’affect incommensurable que la rencontre suscite chez Will (« It’s almost more like a feeling »). Le sentiment oppressant s’étend à la fois en durée et en étendue (« I feel it everywhere. Everywhere. I-I still feel it »). Il est particulièrement intéressant de souligner que même la nature du sentiment éprouvé est inconcevable : les mots « almost », « more » et « like » agissent comme adverbes pour souligner l’incertitude du personnage. En effet, tout en appartenant au registre de la peur, le sentiment éprouvé est surtout de l’ordre de l’aliénation : quand Will ressent le Mind-Flayer en lui, il est du même fait frappé par la perte de son autonomie, d’une part de lui-même. On constate en outre que le sentiment ressenti par le personnage dépasse la simple peur en raison de la réaction physique qu’il engendre. En effet, lorsque Will rencontre le Mind-Flayer, il ressent systématiquement de la chair de poule sur sa nuque, une réaction physique qu’Otto décrit d’ailleurs comme étant surnaturelle et propre à la terreur profonde « assez violente pour traverser la moelle et les os, faire hérisser les cheveux et trembler les membres12 ».

Pourtant, le Mind-Flayer n’est pas un dieu, et le mysterium tremendum a trait à l’expérience irrationnelle propre au fait religieux. En comparant l’horreur cosmique au concept d’Otto, Hunter souligne le caractère profane de l’œuvre de Lovecraft qui était lui-même athée :

Lovecraft explores the mysterium tremendum not so much as a transcendent or sacred reality, but rather as its antithesis – an excessively profane and cruel cosmos. His is a numinousness of the wholly other and alien, incomprehensible [and] deeply deeply weird13.

Le « tout-autre » présent dans l’œuvre de Lovecraft désarçonne donc par sa nature extraterrestre et inconcevable, et c’est cette altérité qui provoque le sentiment d’effroi plutôt que la qualité transcendantale propre au religieux. Cette représentation partielle du concept du numineux en littérature nous permet de mieux concevoir la présence d’un sentiment d’effroi mystique dans l’univers pourtant séculier de Stranger Things, représenté comme complètement laïque avant la saison 4. Dans ce même ordre d’idées, le caractère paradoxal du sentiment numineux se perçoit aussi dans la réaction suscitée par le monstre profane qui « attire, fascine et déroute à la fois14 ».

Dans la saison 1 de Stranger Things, alors que les personnages prennent conscience d’un univers parallèle au leur qu’ils nomment l’Upside Down, ils le décrivent comme « a place of monsters » (S1, EP5, 5:43), un repaire de monstres. En analysant les définitions du terme « monstrueux », Jean Foucart souligne que celui-ci se rapporte à ce qui est « excessif dans son genre15 », « contraire aux lois de la nature16 » ou qui, au figuré, « excède en mal tout ce qu’on peut concevoir17 ». Le monstre est donc une anomalie qui, similairement au « tout-autre », ne se définit que comme altérité, « comme différence par rapport à la perception que l’on a généralement du monde naturel ». Toutefois, sa différence est surtout ancrée dans son aspect physique – qui est soit dépeint comme la monstruosité en soi ou comme la métaphore de celle-ci (loup-garou, vampire, etc.). Ainsi, « la monstruosité, c’est avant tout le corps en tant que forme monstrueuse, insolite, terrifiante ou inédite18». 

« It was almost human, but it wasn’t, » (S1, EP4, 2:10) explique Nancy alors qu’elle raconte avoir aperçu quelque chose à distance, un monstre bipède avec deux bras, deux jambes, un torse, un cou et une tête. Pourtant, malgré sa ressemblance à un être humain, Nancy ne peut le qualifier ainsi, préférant le qualificatif de « cette chose » : 

NANCY : I thought I saw something. Some… weird man or… I don’t know what it was. […]
JONATHAN: What’d he look like? […] This man you saw in the woods. What’d he look like?
NANCY: I don’t know. It was almost like he… he didn’t have–
JONATHAN : Didn’t have a face? (S1, EP4, 33:02-33:47)

Le monstre, nommé ultérieurement Demogorgon, terrifie en raison de l’absence inconcevable de son visage. Cette incapacité à décrire le monstre se perçoit au début de cet extrait par les termes « something » (quelque chose), « weird » (étrange), « I don’t know » (je ne sais pas) et « it » (un pronom utilisé pour désigner quelque chose de non humain). Une fois forcée de décrire physiquement la créature (« What’d he look like? »), Nancy entame sa description chancelante, riant de l’absurdité de son constat en même temps qu’elle bafouille sa réflexion : « It was almost like he… he didn’t have– » « a face ». S’attardant à l’importance du visage dans la représentation de la monstruosité, Foucart cite Caroline Demeule : « Notre propre visage nous annonce comme s’il nous précédait. Il nous délimite et nous identifie dans le monde […], [nous] distingue, sépare et singularise19 ». Dès lors, il est impossible pour Nancy de concevoir la figure qu’elle aperçoit comme étant humaine puisqu’il lui manque un élément clé. Foucart soulignera aussi la manière dont les visages difformes « sont des visages extrêmes, qui renvoient aux limites de l’humain, des visages improbables et pourtant bien réels20 ». Ce qui est « humain » est donc circonscrit à des limites et ce qui transcende celles-ci ne peut plus être perçu comme tel, mais plutôt comme un monstre.

D’après Foucart, la transgression des limites, qu’elles soient normatives ou naturelles, est centrale à la figure du monstre : « Par définition, le monstre n’a pas de limite21 ». Le Demogorgon peut ouvrir des brèches entre l’Upside Down et le monde réel pour y ramener ses proies ; le Mind-Flayer peut s’infiltrer dans d’autres êtres vivants et les contrôler. Toutefois, ce ne sont pas seulement les créatures inhumaines qui sont décrites dans la série comme étant des monstres. En effet, en avouant être responsable de l’ouverture de la brèche de l’Upside Down dans le laboratoire de Hawkins, et donc en partie responsable de l’enlèvement de Will, Eleven révèle : « it’s me, I’m the monster. » (S1, EP6, 42:45). Figure monstrueuse en raison de ses pouvoirs surhumains (notamment la télékinésie qui lui permet de bouger des objets sans les toucher), de sa mésadaptation au monde social qui l’entoure, mais surtout en tant que figure liminaire, Eleven dépeint parfaitement le caractère illimité du monstre. En retirant tout stimulus corporel, l’esprit d’Eleven est capable de se dissocier de son corps et de se déplacer dans un néant noir hors de l’espace – puisqu’elle peut apercevoir des personnages à grande distance – et hors du temps – puisqu’elle peut évoluer dans des souvenirs. Tout en transgressant les limites auxquelles les autres personnages sont soumis, Eleven les réaffirme. Dans cette optique, « l’existence des monstres met en question la vie quant au pouvoir qu’elle a de nous enseigner l’ordre22 » puisque « [s]ans frontières, il n’y a pas de monstres23 ».

L’imaginaire de la souillure : saleté et propagation

Alors que l’anomalie peut être radicalement autre – c’est-à-dire « absolument et essentiellement le contraire et l’opposé de tout ce qui est et peut être conçu24 » – ce qui suscite une réaction profonde et viscérale, elle peut aussi se situer à la limite de nos classifications, en position ambiguë – ni une chose, ni une autre – et provoquer un sentiment d’inconfort et de crainte. La description initiale du Mind-Flayer, contradictoire et paradoxale, peut nous servir d’exemple quant au caractère ambigu de l’anomalie : « it was like this huge shadow only it was alive » (S2, EP5, 1:30). En réalité, le monstre n’est ni vivant, ni une ombre, puisque celle-ci n’est qu’un phénomène visuel prenant la forme de l’objet qui obstrue la lumière, et non pas un être vivant en soi. Dans son ouvrage Sur la souillure, Mary Douglas soulève que l’anomalie est au cœur de notre conception de la saleté et de la souillure. Elle postule que, comme dans les sociétés religieuses, l’idée de la saleté chez les sociétés séculières est « l’expression de systèmes symboliques25 ». Dans un tel cas, c’est la connaissance des organismes pathogènes qui régit les conceptions et les comportements liés à la saleté, la rendant pratiquement indissociable de l’hygiène. Or, malgré sa base empirique, la conception de saleté est aussi symbolique puisqu’elle est relative : une chose peut être sale dans un certain contexte et non dans une autre (par exemple, le fait de placer des souliers sur une table plutôt qu’au sol serait considéré sale). Une fois dénudée de sa connotation hygiénique, la saleté ne réfère en fait qu’à ce « qui n’est pas à sa place26 », qu’à ce qui s’inscrit comme anomalie face à un « ordre symbolique dominant ». En s’inscrivant en dehors de cet ordre – et donc en dehors des classifications régissant la conception symbolique de la réalité des individus dans une culture donnée – l’anomalie est foncièrement irrationnelle. Rappelant les propos de Foucart sur la monstruosité, Douglas souligne que la saleté n’est que « le sous-produit d’une organisation et d’une classification de la matière, dans la mesure où toute mise en ordre entraîne le rejet d’éléments non appropriés27 ». Ainsi, lorsque Eleven soulève le fait qu’elle est différente et qu’elle n’appartient à rien (« I’m different. I do not belong. Anywhere. » (S4, EP3, 17:25)), elle souligne aussi le fait qu’elle s’inscrit à l’extérieur de toute réalité connue, qu’elle y est incompatible.

Souvent, la souillure adopte la symbolique de l’infection virale, prend la forme d’un mal qui s’étend, croît et mute. Il devient alors pertinent de s’attarder au vocabulaire emprunté de la pathologie pour décrire l’anomalie. Lors de la saison 2, alors que le Mind-Flayer creuse des tunnels sous Hawkins, le terme « spreading », qui a trait à la propagation, est utilisé à de nombreuses reprises (« When can we stop it from spreading? » (S2, EP4, 27:53); « they’re growing and spreading » (S2, EP4, 22:20), etc.). L’on ira même jusqu’à comparer le Mind-Flayer au cancer : « it’s been spreading, growing beneath us like cancer » (S2, EP6, 14:10). Pour poursuivre les analogies pathologiques, l’on qualifie aussi la créature de « some kind of virus » (S2, EP6, 24:00). L’on reprendra la même terminologie dans la saison 4, non plus pour référer au Mind-Flayer spécifiquement, mais plutôt à l’Upside Down en général et au mal auquel il est associé : « But this evil, it’s like a virus. Each time it returns, it comes back stronger, smarter, deadlier » (S4, EP3, 53:40-53:52). L’enjeu ne réside donc pas simplement dans le fait que la saleté s’étend, mais qu’elle est une menace qui évolue, se perfectionne, et que la souillure qu’elle engendre est dangereuse et « evil ». Ainsi, lorsqu’il explique que « Billy’s mind is– is sick and diseased. The Mind-Flayer is in him » (S3, EP6, 38:00), Mike souligne en fait que l’esprit de Billy est malade à cause du Mind-Flayer, que c’est le contact avec l’entité parasite qui l’a souillé.  

Dans la série, la souillure de l’individu conduit à la perte de son humanité et à son aliénation. L’individu souillé se transforme en l’anomalie qui l’a contaminé, et c’est cette transformation qui menace. Lorsque confrontée au fait que Will est devenu un hôte pour le Mind-Flayer, Joyce questionne : « What happens when my boy is gone? » (S2, EP6, 24:40).  Le terme « gone », qui réfère au fait de disparaître ou de partir, est utilisé dans la série à titre d’euphémisme de la mort, notamment pour celle de Barbara lors de la première saison (S1, EP7, 33:40). Dans cette optique, la souillure de Will par le Mind-Flayer peut conduire à la mort d’une ancienne version du garçon, jugée pure et authentique. Toutefois, la menace et le sentiment de terreur que suscite le Mind-Flayer ne résident pas seulement dans le fait qu’il peut tuer des personnages, mais aussi dans le fait qu’il les remplace par quelque chose d’autre, qu’il les souille jusqu’à ce qu’ils deviennent comme lui, deviennent lui : « The Mind-Flayer, he flays them. […] They basically become him. » (S3, EP4, 20:35)

La souillure n’est toutefois pas simplement une contamination du corps par la saleté. Pour Paul Ricœur, la souillure est « […] un quelque chose de quasiment matériel, qui infecte comme une saleté, qui nuit par des propriétés invisibles et qui pourtant opère à la façon d’une force, dans le champ de notre expérience indivisément psychique et corporelle28 ». La souillure est donc un phénomène corporel, mais aussi psychique, « qui nuit » ; à la fois un mal physique et un mal moral. Dès lors, en reprenant la conception du mal de Leibniz, l’on peut considérer la souillure à la fois comme un acte qui cause un mal-être, c’est-à-dire un mal physique qui est subi par l’individu souillé, ainsi qu’un acte engendré par un mal-faire, c’est-à-dire par un mal moral qui relève du péché. Le souillé est donc perçu comme coupable de sa propre souillure et responsable de son propre mal-être. Lorsque Will dit : « I don’t know. It came for me and… And I tried. I tried to make it go away […] But it got me, Mom. I feel it everywhere. Everywhere. I–I still feel it. » (S2, EP4, 3:54-4:50), il dévoile que sa souillure est due à une incapacité de s’opposer au Mind-Flayer, à le faire partir. Malgré l’acharnement de Will à se défendre, dépeint par la répétition du terme « I tried », ses tentatives se résoudront ultimement par un échec qui sera responsable de son mal-être.

L’on peut d’ailleurs déceler une responsabilité similairement attribuée aux victimes de Vecna dans la quatrième saison. Afin d’ouvrir des brèches dans Hawkins pour que l’Upside Down puisse s’immiscer complètement dans le monde réel et le souiller, Vecna établit un lien psychique avec des personnages mentalement vulnérables dont la mort sert de catalyseur aux ouvertures. La culpabilité de Fred en lien avec la mort de son ami et celle de Max, face à celle de son frère, ainsi que l’abus de Chrissy et de Patrick par leurs parents respectifs, les hantent et les rendent vulnérables.

LUCAS : I’m fine, just… thinking about Patrick. […] I mean, it’s… it’s like, why him? But then, I remembered this one day, he… he came with a black eye. He said he fell, but clearly he was lying. It’s like, everyone Vecna targets has something in their life. Something that’s–
MAX: Hurting them. Haunting them. (S4, EP6, 28:14-29:02)

En se questionnant sur la raison pour laquelle Patrick a été victime de Vecna (« why him? »), Lucas sous-entend que le choix de victimes n’est pas laissé au hasard et qu’une caractéristique de Patrick doit pouvoir expliquer le mal qu’il a subi. Dans ce cas-ci, c’est le fait qu’il était blessé, hanté, qui explique sa mort. Vecna mentionne d’ailleurs à propos de ses victimes : « I showed them who they really were. I held up a mirror. » (S4, EP7, 1:26:30-1:26:40). En insistant sur le caractère passif de ses actions – il ne forcerait pas ses victimes à halluciner, mais ne ferait plutôt que tenir un miroir –, Vecna attribue la culpabilité du mal subi à ses victimes elles-mêmes, ce qui réitère la conception selon laquelle la souillure implique un mélange de mal-être et de mal-faire.

La menace de l’anomalie : Rites de purification et d’intégration

L’anomalie, le monstre, la saleté, menace non seulement à cause de la souillure qu’elle engendre et qui tue et déshumanise dans le cas de Stranger Things, mais aussi, de manière plus générale, puisqu’elle révèle l’artifice et la fragilité des classifications par lesquelles l’on appréhende le monde. Dans cette optique, Douglas relève un constat : « la ligne de démarcation qui sépare les êtres humains des animaux est menacée chaque fois que naît un monstre. Elle est rétablie dès que l’on colle sur ce phénomène une étiquette quelconque29 ». En s’inscrivant en dehors de l’ordre symbolique, en échappant à toute étiquette, l’anomalie et le monstre troublent la définition de ce qu’est l’humain, remettent en cause ce qui nous définit en tant que personnes et ce qui est au fondement de nos identités propres. Ainsi, « [l]’impur, le sale, c’est ce qui ne doit pas être inclus si l’on veut perpétuer tel ou tel ordre30 », telle ou telle configuration du monde. L’anomalie ne laisse donc pas indifférent : 

On peut traiter les anomalies de différentes manières. Négativement, on peut les ignorer, ne pas les percevoir ; ou encore les percevoir et les condamner. Positivement, on peut affronter délibérément l’anomalie et tenter d’élaborer un nouvel ordre du réel où l’anomalie pouvait s’insérer31.

De ce fait, pour contrer la menace de l’anomalie, il est soit possible de la réprimer et de l’anéantir grâce à des rites de purification, ou de la définir et de l’intégrer à l’ordre symbolique dominant grâce à des rites d’intégration.

L’un des exemples les plus clairs de rites de purification réalisés afin d’anéantir l’Upside Down est l’incinération de la brèche dans le laboratoire de Hawkins. L’acte est dépeint comme seule solution et teinté de l’urgence d’agir : « We can’t keep delaying the burn. […] We have to start the burn. » (S2, EP6, 29:40) L’anomalie est alors une erreur qui doit être corrigée :

See, the thing is we can’t seem to erase our mistake, but we can stop it from spreading. Like, it’s like pulling weeds. But imagine for a moment if a foreign state, let’s say, the Soviets… If they heard about our mistake, do you think they would even consider that a mistake? What if they tried to replicate that? (S2, EP4, 27:43-28:10)

L’urgence ne naît donc pas seulement de la menace de l’anomalie elle-même, mais aussi de la possibilité qu’autrui réagisse différemment, que les Soviétiques ne choisissent non pas de la détruire comme les États-Uniens, mais plutôt de l’intégrer dans leur réalité, qu’ils la normalisent.

D’autres méthodes de purification peuvent impliquer de rendre l’hôte du Mind-Flayer inhabitable en augmentant sa température, ou de s’attaquer à l’origine du problème pour l’empêcher de se propager davantage : « If we can find the source, then maybe we can stop him. Or, at least stop it from spreading » (S3, EP5 30:12-30:28). Toutefois, ce ne sont que des méthodes de ralentissement de la souillure qui se révèlent être des manœuvres d’anéantissement inopérantes. Seule Eleven, une figure liminaire à cheval entre l’Upside Down et le monde réel, peut y mettre un terme puisqu’elle est elle-même une anomalie, et donc elle-même, illimitée (au sens où l’entend Foucart). Ainsi devant la saleté qui est « like a virus. Each time it returns, it comes back stronger, smarter, deadlier », Dr. Owens annonce qu’Eleven est « the only one who might have a shot to hit this thing so hard it can’t get back up » (S4, EP3, 54:42-54:52). Il ajoutera même : « I believe you are the cure. » (55:24)

La purification n’est pas la seule méthode employée dans Stranger Things pour contrer l’anomalie. En effet, d’après Douglas, l’une des méthodes d’intégration des anomalies à l’ordre symbolique dominant est l’étiquetage de celles-ci : « En les nommant, nous modifions notre façon de les percevoir à l’avenir, car, les ayant nommées, nous les rangerons d’autant plus rapidement dans leurs compartiments32 ». Il s’opère alors une rationalisation de la figure de l’anomalie qui consiste en sa conceptualisation en schèmes saisissables par la pensée, et qui s’oppose au caractère irrationnel que suscitait son altérité.

Sous un commentaire soulignant la plus grande ressemblance entre Stranger Things et le jeu de rôle Call of Cthulhu (inspiré de la nouvelle de Lovecraft) plutôt qu’entre la série et le jeu Donjons et Dragons (auquel la série fait pourtant de nombreuses références), ApocalypsePlayers ajoute au fil de discussion Reddit :

True… but the kids in a Call of Cthulhu game wouldn’t be playing Call of Cthulhu—they’d be playing D&D! Hence why all their references are D&D; they use what they know to describe the indescribable33.

Confrontés aux entités cosmiques incommensurables de l’horreur lovecraftienne, les personnages qui s’inscrivent dans un tel univers ne peuvent les décrire qu’avec des références qui leur sont familières et connues. Nommer l’anomalie grâce à des termes familiers permet de la ramener à une réalité rationnelle et de l’intégrer à l’ordre symbolique dominant en lui retirant son caractère « tout-autre ». Dans le cas de la série Stranger Things, les personnages réussissent à appréhender les monstres de l’Upside Down en les comparant à des personnages du jeu Donjons et dragons (D&D) et en les désignant par ces noms. Ainsi, alors que l’onomastique « Upside Down » ne vient pas de D&D, la définition à partir de laquelle les personnages le conçoivent, l’est : « The Vale of Shadows is a dark reflection or echo of our world. It is a place of decay and death. A plane out of phase. A place of monsters. It is right next to you and you don’t even see it. » (S1, EP5, 5:43-6:46) À partir de cette description, l’on comprend pourquoi la ville de Hawkins semble se répliquer telle quelle dans l’Upside down, mais surtout comment Will peut interagir avec des lumières dans un monde alors qu’il se trouve dans un autre. Les deux mondes se superposeraient comme des acétates (« It is right next to you and you don’t even see it. »), et l’on se situe en fait dans l’une et l’autre à la fois.

Dans le cas du Mind-Flayer, son nom tiré de D&D affecte la perception que les personnages ont de lui : 

DUSTIN : The Mind-Flayer. […] It’s a monster from an unknown dimension. It’s so ancient that it doesn’t even know its true home. Okay, it enslaves races of other dimensions by taking over their brains using its highly-developed psionic powers.
HOPPER : Oh, my god, none of this is real. This is a kid’s game.
DUSTIN : No, it’s a manual. And it’s not for kids. And unless you know something that we don’t, this is the best metaphor–
LUCAS : Analogy. […]
DUSTIN : […] Fine. An analogy for understanding whatever the hell this is.
NANCY: […] What does it want?
DUSTIN : To conquer us, basically. It believes it’s the master race. […]
MIKE : It wants to spread, take over dimensions.
LUCAS : We are talking about the destruction of the world as we know it. (S2, EP8, 26:42-27:40) 

La définition que propose D&D permet aux personnages de réfléchir au mode opératoire du Mind-Flayer (« taking over their brains »), mais aussi à ses motivations de conquête et de destruction. Dustin soulève d’ailleurs comment, en raison de l’absence d’informations plus fiables, l’analogie de D&D permet de mieux appréhender l’anomalie qui leur est antagoniste. Toutefois, malgré la rationalisation du Mind-Flayer, malgré le déplacement d’une expérience purement affective vers une expérience conceptuelle de l’antagoniste, les personnages sont tout de même incapables de l’appréhender de manière objective. Leurs connaissances parallèles de D&D régissent la manière dont ils perçoivent le Mind-Flayer, dans ce cas-ci, comme étant une menace qui mène à leur destruction. L’on constate aussi ce biais perceptif lors de la quatrième saison alors que Dustin et Lucas s’attardent aux motivations de Vecna :

DUSTIN : Why would he be opening gates?
LUCAS : To take over the world.
DUSTIN : Who do we know that wants to take over the world?
LUCAS : The Mind-Flayer.
DUSTIN : So if the Demogorgon was just his foot soldier, Vecna’s his five-star general. (S4, EP7, 32:58-33:11)

Pourtant, l’on apprend dans un épisode ultérieur que Vecna est responsable de la création même du Mind-Flayer et qu’il est en mesure de se fusionner avec l’Upside Down pour tout y contrôler. Il n’est donc ni simplement « un five-star general », ni soumis au Mind-Flayer.

En conclusion, en nous attardant à la figure de l’anomalie comme d’un élément incompatible avec un système de perception rationnelle de la réalité ainsi qu’à la terreur que son altérité suscite chez l’individu grâce aux réflexions sur l’horreur cosmique d’H.P. Lovecraft et sur le numineux soulevé par Rudolf Otto, nous avons été en mesure de déceler dans la série Stranger Things un imaginaire de la souillure caractérisé par la menace d’une propagation de l’anomalie qui conduit à la transformation des personnages souillés, coupables de leur propre mal-être. Nous avons ensuite analysé différentes réactions de personnages face à la menace de l’anomalie : d’un côté, il y a une volonté de l’anéantir grâce à des rites de purification tels que l’incinération de la brèche de l’Upside Down et de l’autre, une volonté de l’intégrer à l’ordre de classification en place en la définissant à l’aide d’éléments connus et de noms tirés du jeu de rôle Donjons et dragons. En tant que figure liminaire en soi et possédant des pouvoirs surhumains identiques aux monstres de l’Upside Down, il aurait été pertinent de s’attarder davantage au personnage d’Eleven et de son processus d’intégration dans la société de Hawkins et de Lenora en Californie à la suite de son déménagement.  


BIBLIOGRAPHIE

Corpus étudié

Stranger Things, The Duffer Brothers, Netflix, 2016, 2017, 2019, 2022.

Corpus secondaire

Lovecraft, Howard Phillips, « The Call of Cthulhu », Weird Tales, vol. 11, n° 2, 1928,  p. 159-178.

Lovecraft, Howard Phillips, Lettre à Duane Rimel, 23 juillet 1934.

Corpus théorique

Douglas, Mary, « La souillure séculière », dans De la souillure. Étude sur la notion de pollution et de tabou, Paris, La Découverte, 1992 [1971], 193 p.

Foucart, Jean, « Monstruosité et transversalité. Figures contemporaines du monstrueux », dans Pensée plurielle « Entre-deux, passages, dynamique sociale », vol. 24, n° 2, 2010, p. 45-61. 

Hunter, Jack, « Numinous Dimensions : Exploring Otto’s Concept of the Numinous in Stocker, Macher and Lovecraft », 2014, en ligne, https://www.academia.edu/10339721/Numinous_Dimensions_Exploring_Ottos_Concept_of_the_Numinous_in_Stoker_Machen_and_Lovecraft, consulté le 20 avril 2025.

Leibniz, Gottfried Wilhelm, Essais de théodicée. Sur la bonté de Dieu, la liberté de l’homme et l’origine du mal, Amsterdam, Édition François Changuion, 1734, 403 p.

Lovecraft, Howard Phillips, Supernatural Horror in Literature, New York, Ben Abramson Publisher, 1945 [1927], 106 p.

Otto, Rudolf, Le Sacré, Paris, Éditions Payot & Rivages, 2015 [1917], 285 p.

Ricœur, Paul, « La Souillure », dans Finitude et culpabilité II. La symbolique du mal, Paris, Éditions Aubier-Montaigne, 1960, 496 p. 

Corpus web

ApocalypsePlayers, « When they saw the Demogorgon in Stranger Things. Did anyone else think- Dimensional Shambler? », Reddit, Janvier 2022, en ligne, <https://www.reddit.com/r/callofcthulhu/comments/v7a8cl/when_they_saw_the_demogorgon_in_stranger_things/>. Consulté le 20 avril 2025.


  1. The Duffer Brothers, Stranger Things, Netflix, 2016, 2017, 2019, 2022. Désormais, les références à cette série seront placées entre parenthèses dans le texte suivant la formule suivante : (saison, épisode, minutage). ↩︎
  2. Gottfried Wilhelm Leibniz, « Essais de théodicée. Sur la bonté de Dieu, la liberté de l’homme et l’origine du mal », Amsterdam, Édition François Changuion, 1734, 403 p. ↩︎
  3. Mary Douglas, « La souillure séculière », dans De la souillure. Étude sur la notion de pollution et de tabou, Paris, La Découverte, 1992 [1971], p. 57. ↩︎
  4. Howard Phillips Lovecraft, Supernatural Horror in Literature, New York, Ben Abramson Publisher, 1945 [1927], p. 15. ↩︎
  5. Howard Phillips Lovecraft, « The Call of Cthulhu », Weird Tales, vol. 11, n° 2, 1928, p. 159. ↩︎
  6. Jack Hunter, « Numinous Dimensions. Exploring Otto’s Concept of the Numinous in Stocker, Macher and Lovecraft », 2014, en ligne, <https://www.academia.edu/10339721/Numinous_Dimensions_Exploring_Ottos_Concept_of_the_Numinous_in_Stoker_Machen_and_Lovecraft>, consulté le 20 avril 2025.
    ↩︎
  7. Rudolf Otto, Le Sacré, Paris, Éditions Payot & Rivages, 2015 [1917], p. 63.
    ↩︎
  8. Ibid., p. 113. ↩︎
  9. Howard Phillips Lovecraft, Lettre à Duane Rimel, 23 juillet 1934. ↩︎
  10. Rudolf Otto, Le Sacré, op. cit., p. 113. ↩︎
  11. Ibid., p. 46. ↩︎
  12. Ibid., p. 41. ↩︎
  13. Jack Hunter, « Numinous Dimensions. Exploring Otto’s Concept of the Numinous in Stocker, Macher and Lovecraft », op. cit., p. 10. ↩︎
  14. Jean Foucart, « Monstruosité et transversalité. Figures contemporaines du monstrueux », dans Pensée plurielle « Entre-deux, passages, dynamique sociale », vol. 24, n° 2, 2010, p. 47. ↩︎
  15. Ibid., p. 46. ↩︎
  16. Ibid., p. 47 ↩︎
  17. Idem. ↩︎
  18.  Ibid., p. 48. ↩︎
  19. Ibid., p. 47. ↩︎
  20. Idem. ↩︎
  21. Ibid., p. 48. ↩︎
  22. Idem. ↩︎
  23. Ibid., p. 50. ↩︎
  24. Rudolf Otto, Le Sacré, op. cit., p. 62. ↩︎
  25. Mary Douglas, « La souillure séculière », loc. cit., p. 54. ↩︎
  26. Ibid., p. 55. ↩︎
  27. Idem. ↩︎
  28. Paul Ricœur, « La Souillure », dans Finitude et culpabilité II. La symbolique du mal, Paris, Éditions Aubier-Montaigne, 1960, p. 32. ↩︎
  29. Mary Douglas, « La souillure séculière », loc. cit., p. 59. ↩︎
  30. Idem. ↩︎
  31.  Ibid., p. 58. ↩︎
  32. Ibid., p. 56. ↩︎
  33. ApocalypsePlayers, « When they saw the Demogorgon in Stranger Things. Did anyone else think- Dimensional Shambler? », Reddit, Janvier 2022, en ligne, <https://www.reddit.com/r/callofcthulhu/comments/v7a8cl/when_they_saw_the_demogorgon_in_stranger_things/>, consulté le 20 avril 2025. ↩︎